En désaccord avec ce que l’institution scolaire qui m’employait prescrivait en matière d’évaluation à but certificatif, je me suis progressivement mis à « bricoler des trucs » pour y échapper… en partie.
Ce texte a été publié en avril 2022 sur le site de "Changements pour l'égalité"(https://www.changement-egalite.be/Jouer-avec-les-notes)
Je décidai que la moitié de la note attribuée aux trois « périodes » serait consacrée à l’évaluation de la participation des élèves à mon cours et non pas à celle de l’acquisition de connaissances. Souhaitant les responsabiliser à ce sujet, je remettais à chaque élève, en début d’année scolaire, une « fiche de co-évaluation de la participation au cours d’histoire » leur permettant de s’auto-évaluer selon les critères suivants : écoute active de l’enseignant et des autres élèves ; participation aux activités individuelles et en groupe-classe ; participation aux activités en sous-groupes ; tenue du cahier. Des retraits de points devaient être comptabilisés en cas d’absences et de retards injustifiés. Chaque fiche était imprimée en deux exemplaires : l’une pour l’élève concerné, l’autre pour le professeur. En fin de période, les élèves remplissaient la colonne « élève » de leur exemplaire avant de me remettre leur fiche. Après avoir pris connaissance de leur avis, je remplissais la colonne « Prof » puis, avant de leur rendre la fiche complétée, je recopiais leurs évaluations et les miennes sur mon exemplaire pour en garder mémoire. Ils savaient qu’en cas de désaccord, c’était mon avis qui serait déterminant pour leur attribuer cette « note de participation », mais, ils savaient aussi que, comme pour toutes les autres notes, ils avaient le droit de la contester (voir plus loin).
Les
notes « à l’essai »
Des élèves qui ne
commettent pas d’erreurs au cours d’un apprentissage font la preuve que les
connaissances visées par le dispositif pédagogique mis en place par
l’enseignant leur sont déjà acquises, donc que cet enseignement ne leur était
pas nécessaire. Car quand on apprend, on fait inévitablement des erreurs. Je
considérais donc les erreurs des élèves comme des indices de la pertinence
d’une séquence de cours et, surtout, comme des indicateurs précieux pour guider
mon action d’enseignant.[1]
Il n’était par conséquent pas question de sanctionner ces erreurs en dehors de
moments bien circonscrits réservés à l’évaluation certificative.
·
outre
l’intérêt intrinsèque du travail à accomplir, la possibilité d’obtenir une
« bonne note » constitue un stimulant pour bien le faire ;
·
cela
fournit une information utile aux élèves : la valeur de leur production,
estimée par celui qui évaluera plus tard leurs connaissances « pour de
bon » ;
·
cela
indique clairement aux élèves que la tâche concernée s’inscrit dans un
processus d’apprentissage et non dans l’évaluation certificative ;
· cela permet d’éviter une grande partie du stress lié à la peur de l’échec.
Les épreuves à valeur certificative
Une fois par
période, à la fin de celle-ci, les élèves, prévenus au moins une semaine à
l’avance, étaient soumis à un contrôle individuel de leurs acquis (maîtrise de
concepts, de savoir-faire, d’attitudes intellectuelles), dont la note chiffrée
était dans ce cas conservée, quelle qu’elle fut. Mais, vu que la moitié
seulement de la note de période était concernée, et qu’une éventuelle
« mauvaise note » au contrôle pouvait être compensée grâce à des
travaux « notés à l’essai » mieux réussis, l’impact négatif d’un
échec au contrôle pouvait être fortement diminué.
Dès le début de l’année scolaire, les élèves étaient prévenus : toute note attribuée par le professeur, qu’elle concerne la participation au cours ou des travaux quels qu’ils soient, pouvait être contestée auprès de lui, mais en dehors du temps de cours, à un moment convenant à la fois à l’élève concerné et au professeur. Conditions supplémentaires lorsqu’il s’agissait de productions écrites : cela ne pouvait se faire qu’après le moment consacré à leur correction collective et, pour les travaux en sous-groupes, il fallait que tous les membres du groupe concerné soient présents. Cette possibilité était utilisée régulièrement. La motivation première des élèves était généralement d’obtenir une note plus élevée. Les miennes étaient, par ce moyen, d’une part de reconnaître une part de subjectivité de ma notation, d’autre part de profiter de ces moments pour revenir avec le ou les élèves concerné(s), sur certaines de leurs difficultés de compréhension. Ce qui avait souvent pour effet qu’ayant mieux compris en quoi consistait leur erreur, les élèves abandonnaient leur revendication de départ. Mais il n’était pas rare que certains d’entre eux trouvent des arguments que je jugeais pertinents pour accepter un changement de la note en leur faveur.
Les examens
Depuis le début des
années 1990, dans mon réseau d’enseignement (celui de la « Fédération
Wallonie-Bruxelles »), organiser deux sessions d’examens par an n’est plus
une obligation. Dès ce moment, dans les différentes écoles où j’ai fonctionné,
j’ai plaidé chaque année auprès de mes collègues et de la direction pour que
celle de décembre soit supprimée, ce qui aurait permis de consacrer trois
semaines de plus aux apprentissages plutôt qu’à l’évaluation des acquis. Ce fut
chaque fois en vain.
En conseil de
délibération, j’ai toujours plaidé, souvent avec succès, pour que la réussite
de l’examen de juin, censé servir à évaluer les compétences acquises au cours
de l’année scolaire écoulée, suffise pour considérer que l’élève se les étaient
bien appropriées dans la branche concernée, qu’il n’était pas nécessaire qu’ils
aient obtenu plus de la moitié de la somme totale des points de l’année
scolaire.
[1]
Cf. J.-P. ASTOLFI, L’erreur, un outil
pour enseigner, ESF, 1997.
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