... à propos du "chahut" dont il a été le meneur le 7 février 2012 et qui visait à perturber une conférence-débat intitulé "L'extrême droite est-elle devenue fréquentable ?". Cet événement, organisé à l'ULB par "Cultures d'Europe" dans le cadre des "débats de l'ULB" , était présidé par Guy Haarscher et les deux orateurs invités étaient Hervé Hasquin et Caroline Fourest. C'est la présence de cette dernière qui fut à l'origine de ce "chahut" prémédité. Alors que l'action très bruyante des pertubateurs visant à empêcher Caroline Fourest de se faire entendre durait depuis plusieurs minutes sans faiblir, le président de séance prit la décision de mettre fin prématurément à l'activité.
Souhail,
J’ai pris connaissance de ce qui s’est passé mardi dernier à l’ULB lors de la conférence dont le titre était « L’extrême droite est-elle devenue fréquentable ? », présidée par Guy Haarscher et dont les orateurs étaient Hervé Hasquin et Caroline Fourest.
L’action visant à empêcher ce débat de se tenir m’a très fort choqué et mis en colère. Et le fait que tu en sois à l’initiative m’a fortement étonné.
En effet, à la suite du houleux débat sur le thème de la liberté d’expression organisé à l’ULB par le Cercle du Libre Examen le 20 septembre 2010, tu avais été victime de diffamation et je fus parmi ceux qui avaient pris ta défense. Les circonstances dans lesquelles ce débat s’était déroulé m’avait aussi incité à coucher sur papier mes réflexions sur le même thème dans un article paru dans « Points Critiques », le mensuel de l’Union de Progressistes Juifs de Belgique : « De la liberté d’expression et de ses usages ». J’y défendais l’idée que, pour un démocrate, sanctionner la liberté d’expression n’est admissible qu’a posteriori et uniquement dans les deux cas suivants : la diffamation et l’incitation à la haine raciale. Tu en avais pris connaissance et tu m’avais écrit que tu partageais entièrement mon point de vue.
Je suis bien obligé de constater aujourd’hui que tu as changé d’avis.
Je sais qui est Caroline Fourest et j’ai le plus grand mépris pour son « œuvre ». Je sais l’eau qu’elle apporte au moulin de l’islamophobie. J’admets aussi sans problème qu’il y avait peu de chance que le débat soit intéressant car rassemblant des personnes que je pense être, pour l’essentiel, « du même bord » idéologique. Dans « De la liberté d‘expression et de ses usages », je déplorais d’ailleurs que la majorité des « débats » publics aient lieu entre des personnes qui défendent des points de vue proches, que les débats vraiment contradictoires soient de plus en plus rares.
Mais rien ne peut justifier à mes yeux qu’on empêche un débat d’avoir lieu. Car ceux qui se livrent à de tels actes bafouent un des fondements principaux de la vie démocratique : la liberté de s’exprimer et de débattre publiquement.
Et si votre intention était de commettre un acte de représailles à l’encontre de personnes ou d’institutions qui ont fait interdire des débats dans le passé, je considère que vous vous engagez dans un cycle infernal indigne de démocrates et extrêmement dangereux pour la démocratie : où va-t-on si chacun se met à s’arroger le droit d’interdire à d’autres de s’exprimer publiquement sous prétexte qu’on s’attend à des propos très critiquables et/ou à une absence de débat contradictoire entre orateurs invités ?
Malgré le fait que nous sommes loin d’être tous égaux pour ce qui concerne l’accès aux médias de masse, en démocratie nous ne manquons pas de possibilités de réagir à l’expression d’idées que nous n’apprécions pas. Dans le cas présent, rien ne vous empêchait d’exprimer votre indignation sur Internet, en distribuant un texte à l’extérieur de l’auditoire ou en intervenant dans le débat.
Ce qui me met aussi en colère est le fait que, par cette action, au lieu de contribuer à lutter efficacement contre l’islamophobie, vous donnez du grain à moudre aux islamophobes qui auront beau jeu d’en rajouter une couche sur ces « musulmans fanatiques » qui « veulent nous imposer la charia ».
Mais cette colère que je ressens aujourd’hui ne m’empêchera pas, comme je l’ai fait par le passé, de m’opposer aux amalgames et à la diffamation : j’ai déjà entendu certains de ceux qui entretiennent systématiquement la confusion entre antisionisme et antisémitisme te traiter à nouveau d’antisémite.
Michel Staszewski 9 février 2012
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